Les ruines font partie de l’identité visuelle du Liban : les immeubles du centre ville de Beyrouth transformés en dentelle par quinze années de violences, aujourd’hui rasés et remplacés par des complexes aussi propres qu’anonymes, les attentats, le quartier du Hezbollah bombardé…
Malgré une frénésie immobilière qui tend à uniformiser l’image du pays, il n’est pas rare de croiser des no man’s land portant encore les stigmates de combats terminés il y a plus de dix ans… Cela étonnera surtout l’occidental, habitué à une institutionnalisation de la mémoire. Ici, elle se rappelle au quotidien un peu partout, à travers ces immeubles pas réellement terminés, éventrés, à moitié détruits, jamais revendiqués ou réhabilités.
L’armée syrienne se retire du Liban en 2005, laissant à l’abandon ses positions et notamment beaucoup de constructions dans la région du Mont Liban. Ces bâtiments ont été kidnappés par la guerre, certains sont nés à cause d’elle, très peu ont joué leur rôle d’origine, hôtel, villa, appartement de vacances… tous ont vu passer les réfugiés, les milices, l’armée. Avec leurs nombreuses vies et identités, ils portent en eux les traces de l’histoire de ce pays.